"Pour moi, la pire des choses serait de vivre esclave.
On peut tout avoir : à manger, à boire. De quoi se vêtir, un toit où se loger :
Si on n'a pas la liberté, si on n'a pas la fierté, si on n'est pas indépendant, cela n'a ni goût, ni valeur"
Ahmad Shah Massoud
Darah Afghanistan
99 rue Leguen de Kerangal 35200 Rennes
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08/10/2022
Qui sont les ennemis du gouvernement en place ? Toutes celles et tous ceux qui, par leur façon de vivre, de croire, n’adhèrent pas à la doctrine des taleban.
Les femmes en font partie, les soufis en font partie, les chiites - qu’ils soient ou non hazara - en font partie, les journalistes en font partie, les juges et procureurs en font partie.
Aujourd’hui, le gouvernement des taleban instrumentalise une doctrine d’asservissement par tous les moyens dont ils disposent. Ils ont décidé l’effacement de la femme de la société civile. Un visage féminin ne peut être montré dans la rue, ce visage doit être caché sous un morceau de tissu, devenir anonyme. Le ministère de la promotion de la vertu et de la répression du vice a remplacé celui de la condition des femmes et sert à instrumentaliser la répression à leur encontre en édictant toute une série de lois ineptes pour mieux affermir leur pouvoir. La tenue vestimentaire est l’une des lois très surveillées par les sbires taleban. Si une femme est surprise dans la rue ne respectant pas l’obligation vestimentaire, c’est le mari, le frère ou le fils qui est interpellé dans un premier temps, le rendant responsable de l’attitude de la femme. Les hommes de la famille sont donc tenus responsables de la bonne application de ces lois. A deux avertissements succède une peine de prison ferme pour le responsable mâle. La femme n’a plus sa place dans la société, elle est tenue pour irresponsable de ses actes. C’est sa disparition programmée. De quel courage ont dû faire preuve ces quelques femmes afghanes qui ont osé manifester dans les rues de Kaboul le 15 août 2022, désigné comme le « jour noir » de l’Afghanistan, à l’occasion de la première année du régime des taleban. Et elles continuent de manifester sporadiquement malgré les menaces et les disparitions.
Dernièrement, une mosquée du quartier de Khair Khona a été la cible d’un attentat revendiqué par l’Etat Islamique. Le prêche était mené par un mollah proche de la mouvance soufie d’Afghanistan. Ce n’est pas la première fois que les soufis ont été attaqués par des attentats les années passées. Les taleban les considèrent comme des hérétiques. Et il faut couper la tête à tout opposant comme l’avait déclaré l'imam de la mosquée d’Hérat, soutien de premier plan des taleban, lors de l’assemblée des dignitaires religieux à Kaboul en juillet dernier. (Ce dernier a été tué dans l'attentat contre une mosquée d'Hérat le 2 septembre). Cette fois-ci, DAESH a été le bras armé du régime des talebans. Car leurs ennemis sont communs et la parole du ministre taleb leur a donné carte blanche.
Jusqu’où ira cette escalade dans la volonté d’assouvir un peuple ? Si les femmes sont destinées à disparaître de la sphère publique, les taleban veulent que ce soient les hommes de la famille qui en portent la responsabilité.
A ce jour, la vie quotidienne est devenue un combat de tous les instants, celui de se nourrir n’étant pas le moindre. Des familles vendent leur fille pour pouvoir nourrir le reste de la famille, la réduisant ainsi à l’état de marchandise. Certains hommes vendent un rein pour la même raison, réduisant leur propre corps à l’état de marchandise.
Jusqu’où ira l’ignominie ? DARAH refuse cet état de fait et poursuit son combat à travers l’éducation. L’aide allouée à une famille a pour corollaire l’ouverture d’une classe pour les enfants d’un quartier de Kaboul. Conserver sa dignité, donner de l’espoir, lutter contre le mariage forcé ou précoce, ouvrir une fenêtre sur l’avenir, telles sont les raisons de notre lutte. Nous savons que nous sommes des gouttes d’eau mais nous ne pouvons nous résoudre à baisser les bras. Et tant que nous pourrons respecter ces valeurs, nous continuerons. Car l’Afghanistan se redressera, peut-être dans très longtemps, peut-être ne le verrons-nous pas nous-mêmes, mais nous n’avons pas le droit d’abandonner celles et ceux que nous avons côtoyés, qui nous ont accueillis, qui ont cru dans les projets d’éducation.
Continuer d’amener ces enfants, filles, garçons, jeunes femmes, jeunes hommes sur le chemin vers la connaissance, c’est résister à l’oppresseur. Nous avons besoin de vous tous dans cette lutte. Nous avons besoin de vos dons pour continuer.
Rejoignez ceux qui chaque mois donnent 5€, 10 €, 20€ ou plus, car même s’ils savent que la lutte est rude et inégale, face aux armes et à la faim, ils savent aussi que nous ne devons pas abandonner le peuple afghan.
Alors à tous ceux qui soutiennent les actions de DARAH nous disons un grand Merci. Merci pour votre soutien sans faille !
08/10/2022
15 août 2021 : cette date restera une date fatidique dans l’histoire de l’Afghanistan. Celle de la débâcle du monde démocratique face à celui de l’obscurantisme de fanatiques déconnectés de la réalité, embourbés dans une vision autoritaire et rétrograde du fonctionnement de la société où domine le pouvoir sur des humains à qui ils ont enlevé la majuscule.
15 août 2022 : une année a passé. Une année de souffrances, une année de désolation, une année de survie, sans espoir, une année où petit à petit la chape de plomb se referme sur un peuple démuni, abandonné à son sort, sous la férule de lois engendrant la terreur et annihilant l’être.
Femmes et enfants sont les premières cibles, elles parce qu’elles donnent la vie que les talibans veulent dominer à n’importe quel prix, eux parce qu’ils en sont le résultat et qu’ils sont malléables. Tuer la vie, celle qui est joie, renouveau, avenir, espoir. Embrigader ces forces, les ensevelir dans un carcan d’interdits : interdiction d’étudier, interdiction de travailler, interdiction de voyager, ces trois seules lois sont suffisantes pour détruire un peuple. L’Ego-monstre de Sayd Bahodine Majrouh* dévore l’Afghanistan, le Commandant Massoud avait alerté et a payé de sa vie son combat pour la liberté.
Où est l’Afghanistan, ce pays aimé, chéri, dont la seule évocation fait surgir des visages, des lieux, de la musique, des danses, des fêtes, des rires et de la joie.
Espoir, tu ne dois pas nous abandonner.
Vie, tu dois nous soutenir.
Darah continue à soutenir celles et ceux qui ne peuvent accepter, celles et ceux qui ne se reconnaissent pas dans ce monde d’interdits.
Nos moyens sont modestes mais ils ont le mérite de continuer malgré les difficultés : soutenir encore et toujours nos équipes sur place pour que les enfants aient une éducation digne de ce nom, car les écoles autorisées des taliban glissent irrémédiablement vers le modèle de l’école coranique.
En collaboration avec nos équipes, nous ajustons nos activités à la réalité du terrain. À Kaboul, de nombreux enfants ne vont plus à l’école. Nous venons d’ouvrir deux classes clandestines qui accueillent les enfants d’un quartier de la banlieue de Kaboul, filles et garçons. Les cours en ligne de formation aux logiciels de DAO-CAO pour les étudiants en architecture et ingénierie continuent. Sans doute, peu de choses au regard des besoins immenses, mais aller chaque jour à l’école donne un sens et un but à une vie, avec l’espoir que les choses peuvent encore changer.
*Sayd-Bahodine Majrouh, dans Le Voyageur de Minuit (Ego-Monstre 1) suivi de Le Rire des Amants (Ego-Monstre 2) rêve le présent et l'avenir d'un pays imaginaire (en lequel il n'est pas trop difficile de reconnaître l'Afghanistan) menacé par de bien inquiétantes chimères. Composé avant l'invasion soviétique de 1979, le texte se révèle à mille et un égards singulièrement prophétique …
Sayd Bahodine Majrouh (1928-1988) a fait des études de philosophie à Montpellier et était en conséquence francophone. Ancien doyen de la faculté de Kaboul, il était l'une des voix les plus rebelles d'Afghanistan... Il a été assassiné à Peshawar par les talibans à la veille de son soixantième anniversaire.
02/10/2022
Elles s’appellent Nouria, Hamida, Zohrah, ou encore Ferechta, Nazanine, ou Fatimah. Elles ont entre 17 et 21 ans, elles préparaient le concours d’entrée à l’Université, elles avaient encore des rêves.
Vendredi 30 septembre, leur rêve a volé en éclat. Rescapées de l’attentat perpétré dans le centre éducatif Kaaj du quartier de Dasht-é-Barchi, ces jeunes filles ont été opérées, elles sont aujourd’hui soit en réanimation, soit dans le coma, elles sont toutes mutilées, dévisagées.
L’un des formateurs en CAO-DAO de notre association a perdu deux de ses cousines. Il nous a fait parvenir une liste de 15 noms de jeunes filles hospitalisées. DARAH lui a envoyé une aide d’urgence de 500 € à distribuer auprès des familles les plus dans le besoin suite à ce drame. Nous vous faisons part de son message : "Rien n’est plus beau que cette aide, merci infiniment".